05 janvier 2016 actualités

Parole d’expert : Arnaud Dassier. « Entreprises : la bataille se joue aussi au niveau du débat d’idées sur l’agora du web »

00131d813258ee574996fd76adc0d5bb90d12cec   Ce qui est vrai dans le domaine politique l’est aussi dans le monde économique. La déroute intellectuelle précède souvent la défaite dans les affaires. Quel meilleur exemple que celui du gaz de schiste, dont le processus de diabolisation, démarré sur le web, a conduit en quelques années à son interdiction pure et simple, avec les répercussions que l’on sait pour les industriels et énergéticiens européens ? La sphère des idées contamine de plus en plus souvent celle des affaires, notamment du fait de la chambre d’écho et de mobilisation sans précédent qu’est devenu l’Internet. Depuis quelques années, toutes les études menées auprès des clients, des leaders d’opinion et des décideurs, font le même constat : internet est devenu leur première source d’information, d’inspiration et d’approfondissement. Dès lors, pour les entreprises, le choix est simple : participer à la « fabrique » des idées, c’est à dire prendre part au débat, notamment sur le Net, ou subir. Si certaines sociétés ont intégré l’influence dans leurs stratégies, d’autres, en revanche, font preuve de naïveté et laissent des facteurs extérieurs, dont elles n’ont même pas connaissance, décider de leur sort. Dans un monde où la bataille des idées fait rage sur Internet, force est de constater que toutes les entreprises ne concourent pas à armes égales, tributaires qu’elles sont de nouveaux mécanismes d’influence qu’elles appréhendent avec plus ou moins de brio. Toutes les entreprises, y compris les PME et les ETI, sont concernées par ce nouveau paradigme. Les activistes de la société civile ou politique ont compris l’importance d’agir sur les émotions du public, via le levier d’influence et de mobilisation efficace que leur a apporté Internet, pour imposer leurs idées et parvenir à leurs fins. Les ONGs sont devenues maîtres dans ce domaine, au point d’intimider les décideurs et de dominer aujourd’hui l’agenda de l’Union Européenne, à travers leur influence sur les médias et l’opinion publique. Omniprésents, les médias Web et les réseaux sociaux amplifient l’efficacité les opérations d’influence. Il suffit en effet d’un simple clic pour découvrir une cause, la relayer dans son entourage, devenir militant, faire un donc, signer une pétition… La réputation des entreprises, qui est leur capital le plus précieux, s’en trouve fortement fragilisé, puisque ces dernières ont été dépossédées de l’autorité qu’elles avaient sur elles-mêmes et sur leurs enjeux stratégiques. Les menaces qui pèsent sur les entreprises ne viennent pas seulement des ONGs et de leurs concurrents, mais aussi de certains Etats qui mènent des actions pour favoriser leurs entreprises nationales, en usant de méthodes aussi discrètes qu’efficaces. Les Etats-Unis, qui depuis plus d’un siècle exportent leur American way of life dans le monde entier, demeurent imbattables dans ce domaine. Mais d’autres pays commencent à maîtriser les mécanismes de cet impérialisme des idées et tentent à leur tour de s’imposer en douceur. Dans ce contexte, il est nécessaire pour les entreprises de développer leur propre soft power. Une puissance d’influence ou de persuasion fondée sur des moyens idéologiques, juridiques, émotionnels ou culturels est la capacité pour un acteur d’influencer le comportement d’autres acteurs par des moyens non coercitifs. L’Internet démultiplie les opportunités dans ce domaine. La publicité et le marketing sont désormais insuffisants. La communication corporate souffre d’un « reach » marginal, d’un discours trop maitrisé pour être percutant et d’une faible crédibilité. Pour les entreprises, cela signifie qu’elles doivent apprendre à maîtriser un nouveau type de conversation avec tous leurs interlocuteurs, là où ils se trouvent, c’est-à-dire sur les carrefours d’audience et les lieux de débat d’Internet. Mais aussi mobiliser leurs alliés naturels pour participer au débat d’idées sur le web. L’enjeu est d’accroître leur influence et de faire entendre leurs points de vue, afin de s’assurer qu’ils soient présents là où se forge désormais l’opinion publique. Tous les outils et toutes les démarches mis à disposition par Internet doivent être exploités pour faire passer les messages. Au-delà de la nécessité stratégique de défendre leurs intérêts, c’est aussi, pour les entreprises, un droit et un devoir démocratique que de contribuer à faire vivre la pluralité des idées.

  • Un droit car, de par leur rôle majeur et leur expertise, les entreprises sont plus que légitimes pour participer au débat, d’autant plus depuis qu’on leur demande d’être des acteurs citoyens et socialement responsables.
  • Un devoir car, en opposant la raison, le pragmatisme et l’expertise au règne de l’idéologie et de l’émotion, les entreprises apportent une contribution positive et utile au débat d’idées.

  A propos de l’auteur, Arnaud Dassier Après un parcours politique de 1993 à 1998, Arnaud Dassier a créé en 1999 l’agence web L’Enchanteur des nouveaux médias, avec Bruno Walther. Véritable pionnier de l’internet politique de 1997 à 2007, il vend l’agence fin 2007 à The Marketingroup dont il a dirigé le pôle digital jusqu’en 2010. A côté d’une activité de conseil stratégique digital, Arnaud Dassier a aujourd’hui une activité de « Business Angel », auprès de sociétés comme le groupe AlloMédia (annuaires 2.0), Ad4screen (publicité sur mobile), Atlantico (média en ligne), Cause Buider (application de mobilisation)… Son blog

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